Témoignage de mon ami d’Alep, Alexandre Jdiaa, sur la situation actuelle en Syrie en juin 2025.

Un Etat failli

  1. Les institutions de l’État souffrent d’un déficit alarmant d’expertise, de compétences professionnelles et de qualifications administratives, conséquence du départ des cadres expérimentés de l’ancien régime. Ces postes sont maintenant attribués en fonction de l’allégeance plutôt que de la compétence.
  2. L’application de la justice transitionnelle est restreinte aux atrocités commises par l’ancien régime, tandis que les autres violations et les crimes civils sont largement négligés.
  3. Il n’y a pas de porte-parole clair pour le pouvoir en Syrie. Les décisions sont plutôt annoncées par des comités ou des chefs, et non par l’État syrien en tant qu’institution souveraine. Par conséquent, les citoyens syriens ne savent plus à qui s’adresser en cas de problème.
  4. Le contrôle sur les factions armées indisciplinées, en particulier dans les régions côtières, est faible.

La mentalité des Syriens a profondément changé

  1. Treize ans de guerre ont non seulement détruit les maisons, ils ont aussi brisé les liens sociaux, que ce soit entre les religions, les ethnies ou les régions. Les camps opposés se considèrent maintenant comme des ennemis.
  2. Durant le conflit, « tout le monde tuait tout le monde » : le régime, l’opposition, Daech, les différentes milices… et les victimes civiles viennent de toutes les confessions et de toutes les communautés.
  3. Les services publics n’ont pas progressé, les conditions de vie se sont dégradées, et les prix ont grimpé.

Quant aux côtés positifs, on peut noter la fin d’un service militaire long et difficile, la libre circulation des devises étrangères, ainsi que la disparition des sinistres prisons…